A la mort de Raphaël, en 1520, on trouva dans son atelier un tableau, peint vers 1519, qu'il gardait précieusement pour lui-même et avait muni de deux volets de
bois pour le dissimuler aux regards. Plus tard, on lui donna un titre : "La Fornarina". Qui était cette inconnue ?
Le tableau révèle une jeune femme à demi-nue, détournant un regard malicieux ; ses charmes auraient tourné la tête au peintre.
L'histoire raconte qu'elle aurait été l'amante de Raphaël et que ce dernier aurait nourri pour elle des sentiments passionnés. Il lui aurait d'ailleur déclaré son amour à travers la toile.
Aussi, suffit-il de regarder plus attentivement le bracelet que la jeune demoiselle porte au bras gauche. On peut y lire le sceau du peintre : "Raphaël Urbinas". Etreignant le bras plus qu'il ne le pare - les plis de la peau en sont témoins -, le bijou perd sa mission de coquetterie et d'apparat pour devenir marque de possession. Comme l'artiste signe son tableau, il appose son appartenance au sujet de dernier : l'objet de ses désirs, la jeune femme brune "Marquée au fer rouge". La Fornarina lui appartient.

Le thème de Raphaël et la Fornarina illustre un sujet cher aux artistes : celui des rapports du peintre avec son modèle. Henri Zerner a écrit à propos de cette oeuvre qu'elle était "l'expression même en peinture de sa théorie esthétiue" car Raphaël constituait pour Ingres son maître à peindre et à penser. Le sujet qui semble à premire vue anecdotique est en réalité un commentaire d'Ingres sur la peinture de Raphaël. C'est aussi l'affirmation de la supériorité de l'art du portrait, un genre dans lequel Ingres excellait et qui était alors considéré comme mineur.

De multiples particularités révèlent une fois encore la passion de Raphaël pour son modèle, comme la perle de sa coiffe - signe d'amour - ou les feuilles de laurier en arrière-plan, rappelant la mythologie Daphné, l'aimée d'Apollon. Mais l'identité de la figure restera mystérieuse et les interprétations iront bon train, multipliées par une vraisemblable alliance à l'annuaire gauche...
Amante ou fiancée du peintre, la jeune femme au regard espiègle gardera son secret.
